Marina Abramović
L’oeuvre de l’artiste serbe Marina Abramović se compose majoritairement de réalisations vidéo et d’installations sculpturales, intrinsèquement liées à la dimension première de sa pratique : la performance. Étant l’une des pionnières de la seconde génération de body artists, elle repousse au plus loin les frontières de l’exploration de ses propres limites, physiques et mentales, et les dépasse même à plusieurs reprises. Cette rude mise à l’épreuve peut être perçue comme une extériorisation des grandes questions sur l’identité, les différences et les ressemblances culturelles, l’aliénation et le genre. La connexion entre l’interprète et le public est, dans cette optique, un facteur clé. Abramović s’aventure sur un terrain criblé de contradictions flagrantes, comme la raison et les sentiments, l’intimité et l’excès, mais aussi l’esthétique et la brutalité. Elle tâche de dégager complètement son corps et son esprit de tous les fardeaux.
De 1976 à 1989, elle noue une étroite collaboration avec l’artiste allemand Ulay, qui fut également son compagnon pendant cette période. Abramović peut désormais mener ses expérimentations physiques avec deux corps, capables de se comporter l’un envers l’autre à la manière du jeu dialectique de contrastes au niveau conceptuel. Le titre Relation Works, qui fait référence aux rapports mutuels internes et externes entre les individus, fait référence à une série très connue de performances réalisées entre 1976 et 1981. Un exemple est leur célèbre Nightsea Crossing, interprétée pas moins de 22 fois entre 1981 et 1987, sur une période de 90 jours au total, dans des villes telles qu’Amsterdam, Berlin, Sydney, Helsinki, Ushimado, São Paolo et Lisbonne. Des heures durant, les deux artistes se font face, immobiles et silencieux, assis à une longue table. Cette oeuvre exprime une sorte d’opposition silencieuse à la mentalité matérialiste de la civilisation occidentale du 20e siècle, à l’évolution effrénée.